Cette complication potentielle de la stimulation ventriculaire apicale droite a récemment fait l’objet d’une revue dans Heart Rythm. Les études publiées ont été reprises et leur méta-analyse réalisée .
Les effets délétères évoqués de ce type de stimulation sont multiples : activation de type bloc de branche gauche (à l’origine d’un retard et d’un asynchronisme d’activation ventriculaire gauche), diminution de la fonction systolique, déplacement de la courbe pression-volume avec une diminution de la pression télésystolique et une augmentation du volume de fin de systole (ces effets étant plus marqués en cas de dysfonction systolique préexistante). La désynchronisation peut également entrainer une fuite mitrale, une dysfonction diastolique par prolongation du temps de relaxation. Ces altérations de la fonction systolique, diastolique et la fuite mitrale favorisent la survenue de FA.
Les études étaient retenues selon plusieurs critères : 1) faites chez l’homme, 2) donnant une définition précise de la cardiomyopathie stimulo-induite , sa prévalence , ses facteurs de risques, son pronostic et sa prise en charge, 3) comportant un nombre de patients > 50.
26 études (6 prospectives) comportant un total de 57 993 patients ont été colligées.
Leur comparaison est difficile compte tenu des définitions différentes utilisées . Les 2 plus fréquentes sont la réduction de la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) à 40-50% et/ou sa diminution de 10-15% sous stimulation (les 2 critères peuvent être associés) .
Ainsi la prévalence est estimée à 12% (6 à 25%).
Les facteurs de risque de son apparition sont : sexe masculin, antécédents d’infarctus, Insuffisance rénale chronique, fibrillation auriculaire, FEVG initialement abaissée, durée du QRS natif augmentée, % de stimulation VD, durée du QRS stimulé importante. A noter que la plupart des études ne requièrent pas dans leurs critères d’inclusion de % minimal de stimulation avec une charge variant de 20 à 90%, et que bien que le risque augmente avec le % de stimulation, aucune étude ne détermine de valeur seuil.
6 études rapportent un temps d’apparition de la complication très variable qui varie d’1 mois à 16,9 ans.
9 études ne retrouvent pas de différence de survenue en fonction du lieu de stimulation dans le VD.
Une seule étude mentionne l’existence d’un asynchronisme inter-ventriculaire (délai aorto-pulmonaire > 40ms) sur l’écho-doppler avant implantation comme élément prédictif .
Le traitement repose sur la resynchronisation par stimulation biventriculaire (6 études) , hisienne ou parahisienne (1 étude) , trans-septale droite de la branche gauche (pas d’études publiées > 50 patients).
La stimulation biventriculaire : ajout d’une sonde dans une branche ventriculaire du sinus coronaire permettant une stimulation épicardique du VG . 6 études, 743 patients suivi 6 à 168 mois, % de stimulation disponible dans 4 études variant de 87 à 100%, durée de QRS stimulé avant réimplantation 152 à 184 ms. Amélioration de 11 à 19% de FEVG .Pas de différence de mortalité entre les 2 modes de stimulation apical ou biV dans 2 études.
La stimulation hisienne ou parahisienne : 1 étude, 79 patients , stimulation hisienne ou parahisienne (bloc nodal ou infranodal), amélioration FEVG de 34 à 48%,
La stimulation de branche gauche : résultats préliminaires satisfaisants mais études comportant peu de patients.
Les auteurs concluent à un risque significatif de la survenue de cette cardiomyopathie stimulo-induite chez 1 patient sur 10 et d’un consensus nécessaire dans sa définition pour les études à venir et l’amélioration de sa prise en charge.
On peut espérer sa disparition avec la diffusion de la stimulation trans-septale droite de la branche gauche chez les patients à risque, comme après ablation de la jonction pour FA à cadence ventriculaire non controlée et dysfonction ventriculaire gauche . Il faut rappeler l’importance de la programmation en mode AAIR/DDDR évitant au maximum la stimulation ventriculaire chez les patients appareillés à conduction nodale préservée (maladie du sinus).
Bibliographie
1)Vincenzo Somma, Francis J. Ha, Sonny Palmer, Uwais Mohamed, Sharad Agarwal : Pacing-induced cardiomyopathy: A systematic review and meta-analysis of definition, prevalence, risk factors, and management ; Heart Rhythm : 2023 Feb;20(2):282-290
2)Merchant FM, Mittal S. Pacing induced cardiomyopathy review : Card Electrophysiol Clin. 2018 Sep;10(3):437-445.
3)Tasneem Z Naavi, Chieh-Ju Chaoao , Adverse effects of right ventricular pacing on cardiac function: prevalence, prevention and treatment with physiologic pacing ; Trends Cardiovasc Med 2023 Feb;33(2):109-122.